DJANGO

(Django)

de Sergio Corbucci 1966

Avec Franco Nero, José Bódalo, Loredana Nusciak, Ángel Álvarez ...

Musique de Luis Bacalov

Lien IMDb : Django


Résumé :
Django voyage avec un bien étrange objet : un lourd cercueil. Sur sa route, il sauve une femme maltraitée par des bandits. Arrivant ensuite dans un village quasiment désert, il se rend compte que la même équipe de bandits occupe les lieux.

Critique :
Quatrième western de Sergio Corbucci, Django va permettre à son réalisateur de poser une pierre à l'édifice du western all'italiana, et pas des moindres. Toujours est-il que rien ne pouvait permettre de le prédire. Jusqu'ici Corbucci n'a pas signé de westerns marquants et semble hésiter à faire exploser la démesure qui va le caractériser. Tout d'abord le film a bien failli ne pas être du tout étant donné que l'argent a cruellement fait défaut et que Franco Nero, qui n'était alors qu'un acteur méconnu, avait refusé.
Malgré tout ça, le film est là et compte aujourd'hui de nombreux aficionados. A la première vision, le film souffre d'un manque d'argent flagrant et de l'improvisation pas toujours contrôlée dans laquelle travaillait Corbucci.
N'en demeure pas moins que l'aura qui entoure "Django" est méritée. Une certaine originalité dans le traitement d'une histoire assez basique et sommaire et surtout une vision de l'Ouest pessimiste et violente.
Alors que le western dans son approche classique proposait en introduction l'arrivée du héros à cheval, trottant sur des plaines arrides, le long de la ligne d'horizon. Corbucci nous en offre une nouvelle approche.
Premier plan, Django vêtu d'une tenue de Nordiste en mauvais état et portant une selle de cheval sur l'épaule nous tourne le dos et marche péniblement, quelques notes de guitare l'accompagne et introduit une chanson interprétée par Roberto Fia, à la voix de crooner. Second plan, Django marche dans la boue, ses bottes en sont couvertes puis l'on découvre qu'il traîne un cercueil. Le plan dure jusqu'à la fin du génréique, Django erre tel une ombre dans un décor humide et gris.
La chanson s'adresse à Django et nous permet d'apprendre qu'il a perdu son amour mais lui implore de ne pas perdre espoir "After the showers, the sun will be shining". Ce générique de début a tous les aspects d'un générique de fin. Plan suivant, le film commence et c'est donc le début d'une nouvelle histoire pour Django. Il apparait cette fois face à nous, au loin, le long de l'horizon...le ciel est bleu, le soleil s'est levé.
Ces trois premiers plans donnent une tournure toute particulière au film. Même si le personnage est entouré de mystère, qu'y a-t-il dans son cercueil ?, on en est tout de suite quelque peu familier, on ressent facilement la noirceur et la tristesse qui plane sur lui.
En quelques plans Corbucci signe l'une des plus belles introductions du western à l'italienne, et par la même occasion s'impose d'emblée comme l'un de ses créateurs. Alors que la même année Leone placait son film "Le bon, la brute et le truand" au sein de la guerre de secession, "Django" se situe après cette période. Notre héros était un combattant nordiste et là où il arrive, la défaite des sudistes n'a laissé qu'un goût amer et une frustration grandissante. Corbucci choisit donc un contexte emprunt de désespoir et de rancoeur pour nous plonger, ainsi que son personnage, au sein de sa vision la plus pessimiste.
Tout le film porte cette ambiance grise et boueuse, notamment grâce au travail d' Enzo Barboni à la photo et de Carlo Simi aux décors. Tout a été mis en oeuvre pour donner une vision totalement sordide et désespérée de l'ouest. La ville dans laquelle Django arrive est totalement déserte, seuls quelques prostitués logent au saloon. Les rues sont pleines de boue, il y fait froid. C'est que la ville est entre les mains d'un tyran, le Major Jackson. Il y fait régner la terreur avec ses hommes portant des echarpes et des cagoules rouges. Représantant une sorte de milice évoquant le Klu Klux Klan, lui et ses sbires s'adonnent avec un sadisme non dissimulé au tir au mexicain. Sans tarder, le film va distiller une violence exarcébée où meurtres gratuits et tortures atroces sont perpetrés. C'est un ouest décadent que nous révèle Corbucci, le tout dans une optique sado-masochiste. Car au plaisir que prennent certains personnages à être violents, Django, lui, ne semble pouvoir éviter la souffrance. Dans une scène où l'on découvre que dans son cercueil se cache une mitrailleuse dont il se sert pour massacrer les hommes du major, il laisse fuir ce dernier, lui offrant de fait la possibilité de se venger.
Rarement un western avait été aussi explicitement violent, ce qui lui a sans doute ouvert la voie du succès. Le film a évidemment perdu quelques scènes lors de son exportation, notamment celle où le chef mexicain découpe l'oreille de l'espion du major et la lui fait manger (scène à l'origine de la fameuse scène de l'oreille du Reservoir Dogs de Tarantino ?).
Succès aussi pour Franco Nero qui offre à Django un visage mono-expressif, encore trop proche du personnage d'Eastwood mais lui donnant aussi toute la tragédie nécessaire.
En tout cas son personnage est devenu une référence pour le western latin, on ne dénombre plus les films retitrés "Django" par les distributeurs. "Django" a engendré énormèments de clones...il va sans dire que très rarement ils furent à la hauteur.
20 ans plus tard, Nero reprendra du service dans une suite officielle, nettement moins convaincante : Le grand retour de Django.

Disponible en DVD France Zone 2, edité par Wild Side.